Les origines du FC Metz

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Le FC Metz a fêté ses 90 ans cette année, mais ses origines remontent avant même 1932… Petit saut dans le passé et dans la grande Histoire des Grenats !

Quelle bien triste manière de célébrer un anniversaire… Après trois saisons successives dans l’élite du football français, le Football Club de Metz est retombé dans ses travers en succombant à la tentation de la Ligue 2, après un match à sens unique contre le Paris Saint-Germain, une défaite par cinq buts à zéro à la clef.

Cette descente est d’autant plus dure à accepter lorsque la saison 2021/2022 est censée être la célébration du nonagénaire du club à la Croix de Lorraine. Célébration tout bonnement gâchée le 24 avril dernier, après une défaite 0-1 à domicile contre Brest. Si l’échec remplaça la fête, il serait encore plus frappant d’apprendre que l’anniversaire fêté par le FC Metz n’était en réalité pas celui de la création du club grenat.

Le FC Metz est-il né en 1932…

Faisons un bond dans le passé et revenons en avril 1932. Le Groupement des Clubs Autorisés (ancienne dénomination de la Ligue de Football Professionnelle) vient d’autoriser un club de l’Est de la France à devenir professionnel. C’est ainsi que le FC Metz se voit autoriser, avec dix-neuf autres clubs, à participer au premier championnat professionnel du football français, qui démarrera dès septembre.

Les dirigeants actuels du club considèrent avril 1932 comme la fondation du club grenat, et ceux-ci l’affirment avec ferveur, en témoigne par exemple la biographie du FC Metz sur Twitter « Le Feu Sacré, depuis 1932 ». Bien que cette date soit ancrée dans l’imaginaire collectif, elle ne demeure pas pour autant valide. Pire encore, elle vient injustement balayer treize années d’histoire ô combien importantes pour notre club.

…ou bien en 1919 ?

Remontons cette fois-ci en 1919. La Première Guerre mondiale vient tout juste de se finir. La victoire des Alliés permet à l’Alsace-Lorraine de retrouver ses repères, en redevenant française. Aussitôt fait, les dirigeants français n’hésitent pas à appliquer une politique antiallemande sur ces territoires reconquis, avec l’objectif de supprimer tout vestige de l’Empire voisin. Le populaire sport n’est pas épargné, et nombre de clubs apparus sous le joug allemand se voient dissous.

Metz, deuxième plus grande ville du territoire annexé, n’échappe pas à la règle et le principal club omnisports de la ville, le Metzer SpVgg 1912, cesse d’exister. La voix est alors ouverte à quiconque souhaite devenir la référence de la ville messine en termes de sport. Rapidement, deux clubs parmi les nouveaux créés sortent du lot : le Cercle Athlétique Messin d’une part, et l’Association Sportive Messine de l’autre.

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Naissance de la rivalité entre le CA Messin et l’AS Messine

Ces deux entités n’ont rien pour s’entendre : alors que le CA Messin créé par une élite s’installe au cœur de la ville rue de Verdun, l’AS Messine, club ouvrier, se résigne à élire domicile au Ban-Saint-Martin, alors quartier populaire de la ville. Très vite, les deux clubs s’imposent comme deux cadors du sport lorrain.

En septembre 1920, le premier championnat officiel de football lorrain voit le jour. Le CAM prend la compétition au sérieux et devient très rapidement le meilleur club de la région, sans contestation possible, en témoigne ses sept titres de Division d’Honneur en 12 participations. Malgré cette domination, l’AS Messine s’affirme peu à peu et parvient à concurrencer son voisin. Les rencontres entre ces deux clubs, véritables derbys, sont une lutte des classes à l’échelle du football et les rancœurs sont telles qu’il n’est pas rare de voir le match arrêté pour cause de violences dans les tribunes.

Par-delà les titres, le Cercle Athlétique Messin construit un empire sportif. En 1923, ses excellents résultats dans plusieurs disciplines lui permettent de rêver grand et de s’imaginer un avenir hors de la rue de Verdun. C’est ainsi que vît le jour un stade mythique, toujours vivant aujourd’hui bien que grandement refaçonné, sur l’île Saint-Symphorien. Dans le football, la domination du CAM lui permet de rémunérer illégalement ses joueurs, tous amateurs.

« FC Metz – Section de football du Cercle Athlétique Messin »

Alors, lorsque les instances du football français lancèrent une campagne pour créer un championnat dans lequel les joueurs participants seraient professionnels et rémunérés légalement, c’est tout naturellement que le CA Messin déposa candidature. Pour empêcher la potentielle arrivée de nouveaux investisseurs désintéressés du football et uniquement envieux de l’aspect financier de ce championnat, le Groupement des Clubs Autorisés imposa une règle aux clubs postulants : être affilié à la Fédération Française de Football-Association depuis minimum trois ans.

Cette condition vient alors démonter la date de 1932 comme fondation du FC Metz. Comment un club vieux de quelques mois seulement pourrait-il participer à une compétition fermée aux clubs âgés de moins de trois ans ? En réalité, lorsque le GCA accepta la demande du CA Messin, celui-ci fût dans l’obligation de refonder la hiérarchie de sa section football. Les dirigeants du club ne pouvaient pas gérer une équipe professionnelle, en plus de tous les autres sports amateurs pratiqués au club.

Ils rendirent donc autonome, mais pas indépendante, leur section football avec Jules COCHETEUX à sa tête, en profitant de cette nouvelle autogestion pour rebaptiser la section « FOOTBALL CLUB DE METZ – Section de football du Cercle Athlétique Messin ». Le CAM reste bel et bien le propriétaire du FC Metz, puisque ce dernier garde comme écusson celui du Cercle Athlétique Messin, présent notamment sur le maillot du gardien Joseph CADARIO lors du premier match professionnel de l’Histoire du club. De plus, cette section sportive écope du numéro d’affiliation à la FFFA du Cercle Athlétique Messin.

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Le FC Metz entre conflits d’intérêts…

En 1934, des débats font rage auprès de la mairie de Metz concernant l’utilisation du Stade Saint-Symphorien. En effet, peu de temps après le passage au professionnalisme, le FC Metz est contraint à de gros problèmes financiers l’obligeant à céder son stade à la ville. Dès lors le stade devenu public, l’AS Messine et d’autres vinrent réclamer son utilisation, estimant que le monopole sur l’exploitation du stade par le FC Metz et le CAM n’avait plus lieu d’être. Faute de trouver un accord, la mairie de Metz profita de la situation pour ordonner la fusion du Cercle Athlétique Messin et de l’Association Sportive Messine, fusion qu’elle désirait depuis deux ans.

S’en né le Cercle des Sports de Metz, dont le FC Metz, rattaché au CAM, prit le nom. Pour autant, cette fusion n’est pas synonyme de nouveau départ pour la section football, qui garde le même président, Raymond HERLORY, et les mêmes numéros d’affiliation auprès de la FFFA et de la LLFA (Ligue Lorraine de Football-Association). Des conflits d’intérêts au sujet du football naissent alors au sein du club, entre Maurice MICHAUX, président du CS Metz et Raymond HERLORY, président de la section football. Pour éviter tout autres discordes, il est décidé à l’Assemblée Générale du CS Metz du 6 avril 1936, que la section football serait à nouveau responsable de sa gestion morale, sportive et financière.

…et recours juridiques

Ainsi, lorsque la FFFA exige en décembre que les sections professionnelles de football arborent un nom différent des clubs omnisports auxquels elles sont rattachées, il va de soi pour Raymond HERLORY de faire renaître l’appellation Football Club de Metz. L’idée déplaît à Maurice MICHAUX désireux de trouver un nom proche de celui du CS Metz, mais par faute de pouvoir sur la section football, il n’a d’autres choix pour obtenir gain de cause que d’aller à l’extrême et d’attaquer en justice l’une des sections de son propre club.

Le procès durera un an, jusqu’en janvier 1938, date à laquelle le Football Club de Metz devient indépendant de toute entité pour la première fois de son Histoire, après verdict rendu.  Pour la FFFA et la LLFA, tous ces changements de statut n’ont que peu d’intérêt, puisque le FC Metz garde le numéro d’affiliation n°00376 donné au CAM en 1919. S’il fallait une preuve supplémentaire que le FC Metz n’était pas encore indépendant en 1936, voici les paroles de Raymond HERLORY rapportées au journal Le Lorrain le 31 décembre : « rien n’est par conséquent changé, le F.C. Metz fait partie intégrante du Cercle des Sports de Metz, dont il constitue la Société de Gestion du Football ».

Pourquoi retient-on l’année 1932 ?

Alors pourquoi 1932 ? Quel est l’élément ayant altéré la réalité sur la fondation du FC Metz ? Cette tromperie part d’une édition du magazine France Football, parue en 1947. Dans celle-ci, il est dit que le FC Metz était né de la fusion du CA Messin et de l’AS Messine en 1932.

Sans pouvoir l’affirmer, il semblerait que cette fausse information fût validée par Raymond HERLORY, désireux de rompre tout lien unissant Maurice MICHAUX au club, alors qu’il l’avait présidé de 1921 à 1924 puis de 1930 à 1932, lorsque le club n’était encore qu’une section football amateur.

Enfin, la même année, la FFF redistribua ses numéros d’affiliations, selon une logique précise. Les numéros 1 à 556 étaient alors attribués aux clubs ayant été fondés avant 1921. S’il vous fallait une dernière preuve d’une fondation en 1919, le Football Club de Metz se vît attribuer en 1947 un numéro d’affiliation qu’il possède toujours aujourd’hui, le n°154.

Maxence M.

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