443 27 août 2019 : Raph : Hey fils, tu as vu ce tifo des UB nonante lors du match du 11 août dernier ? [Le soleil se lève à l’Est, mais ne brille que sur Strasbourg] Ils ont (baissé la tête et) plagié notre titre avec une goujaterie toute alsachienne. Gérald : En plus ces lâches sont venus taguer les abords du stade comme des pleutres pendant la nuit, la veille du match… bref. On est parti pour le 4ème épisode ? R : Avant toute chose, j’ai eu quelques retours d’Isham à la suite du dernier épisode, et dois à la vérité de préciser que la bâche de la butte paillade avait été dérobée « à la régulière » juste après la fin de la SG par un groupuscule éphémère (Indépendants Tribune Autoroute) constitué par des ex Graoully. Elle a été effectivement rendue par… le Taureau, si bien que les motivations de ce geste restent inexpliquées (lapalissade). Qui plus est, l’épisode de la Horde sauvage a bien eu lieu la même année que la charge contre les sochariens. Pour le reste, nous pouvons continuer… Ici commence la geste du crépuscule de la SG. L’apocalypse ne signifie pas (seulement) la fin du monde. Étymologiquement, apó (« hors de ») en grec ancien est un préfixe marquant l’idée de mettre dehors, éloigner, repousser, s’opposer, et kalupto signifie cacher, envelopper ; mot à mot, dé-ca-cher. Autrement dit, révéler. Une autre illustration de la mécanique de l’alchimie, précédemment exposée. G : Je tiens quand même à préciser que ma version de Word (tout comme moi) ne connaissait pas le féminin de « geste » et son sens tout approprié, et l’a surligné. Je tenais à le dire… voilà, tu peux continuer. Parlons du crépuscule… R : Le crépuscule des Graoully, loin d’être une fin, va s’avérer être une révélation. Mais revenons à une tentative de récit chronologique. Nous embarquons donc pour revenir en Tribune Seconde, dorénavant et jusqu’à désormais, « ici, chante la jeunesse messine ». Plus qu’une banderole déployée lors du premier match (suivi d’incidents avec une ou deux bâches que nous n’avons pu éviter de voir balancées dans le canal), cette affirmation allait traduire une véritable explosion du groupe. Mes souvenirs s’embrouillent un peu, mais je partage l’expression utilisée par Olivier : « nous marchions sur l’eau ». G : A l’inverse, c’est la période dont je me rappelle le plus, même si je participais déjà côté autoroute depuis quelques temps, c’est là véritablement que j’ai adhéré au projet, sur le tard malheureusement, mais je ne manque pourtant pas de souvenirs et d’images qui resteront gravées à vie… l’ambiance était exceptionnelle et… visuellement… bordel on était bon ! R : Absolument… Tifos, chants, nombre de sympathisants, nous grandissions comme un champignon hallucinogène sous l’arbre humide. Nous allions devenir le véritable moteur de Saint-Symphorien, préfigurant sa configuration actuelle. En face, le kop va disparaître rapidement. Enfin, évoquons plutôt sa transformation vers une image plus ultra, avec la création de génération grenat. Une image, car au fond, les fondamentaux, comment dire, patriotes, restent bon an mal an les mêmes, avec leur cortège de comportements intolérables, qui sont le fait, précisons-le, d’une minorité, mais que la majorité semble néanmoins tolérer. Passons. Ou plutôt non, nous y reviendrons en fin d’épisode. G : On peut effectivement en parler, sans attiser de haine et souffler sur des braises encore chaudes, après tout c’est notre histoire, certains incidents l’ont façonnée. R : Les incidents n’ont jamais cessé. J’ai souvenir d’un déplacement à la Meinau (l’année où je lance « vous vous asseyez » et que le groupe reprend à l’attention des cigognes médusées et aphones, « vous vous taisez !!! ») où les strass viennent au contact mais se trouvent dépités car nos deux blocs s’affrontent avec allégresse. Du coup, nous sommes séparés lors des déplacements (rien de bien nouveau donc…). Seules les photos de l’époque peuvent fidèlement illustrer cette période enivrante pendant laquelle le kaos est en ébullition continue. Mais Gérald, tu as certainement des souvenirs à partager par rapport à ça ? G : Oh je sais très bien où tu veux en venir mon cher Raph… Alors oui. C’est vrai, je n’ai jamais réellement participé à ces fights. J’étais jeune, 16 ans en 95 pour être exact, et ma priorité, outre le FC Metz, c’était la musique et les nanas. J’n’ai jamais été très bagarreur, pour moi la SG ça reste avant tout une expérience sociale et un sentiment d’appartenance, très fort, une meute avec ses différents acteurs, des gueules cassées, des types incroyables avec des personnalités fortes. Des détails qui me restent, comme le taureau et son gruyère (Il achetait toujours un gruyère entier avant le match, c’était son repas) c’est con mais ça m’est resté, certains de ces mecs m’impressionnaient beaucoup, et me retrouver au milieu d’une troupe aussi déjantée mais qui nous acceptait, nous jeunes loups encore innocents que nous étions, c’était fort. Octobre 95 « Les grenats en tête du championnat. » J’aimais nos rassemblements d’avant match, sur le parking du Lidl, nous étions, mes potes et moi des jeunes recrues, volontaires pour les chants, drapeaux, les tifos, mais quand il fallait se frotter aux éventuels groupes adverses, nous étions tout de suite moins fiers. Je pourrais évoquer par exemple la charge contre Bordeaux, c’est une anecdote assez représentative de l’époque. 17h30/18h distribution de bâtons, de torches, devant le Lidl… mes potes et moi écoutons attentivement un discours à la Braveheart (Je ne dirais pas de qui ça émanait…) « Quand vous chargez, regardez droit devant vous et n’ayez pas peur même s’ils sont plus nombreux, vous frappez direct la première ligne, le reste suivra ». Tu parles, sur le chemin jusqu’au stade tout allait bien, mais dans ma tête je me disais « putain mec qu’est-ce que tu fais là ? » et arrivés devant l’actuelle boutique officielle, nous avons vu au loin près de notre chère tribune « canal » les ultras bordelais, « accompagnés » par les CRS. Evidemment au moment où tout le monde devait charger, dans une confusion totale, certains se sont dégonflés, et j’en fais partie bien entendu. Alors on peut rire, et me traiter de lâche, mais si tu réfléchis bien ce n’était peut-être pas si con. Il y avait des pères de famille avec leurs gosses, et voir ces fumigènes voler au-dessus de nos têtes et des leurs, et ces coups qui partaient, ces cris devant le San Siro (actuel Sport Palace), franchement je n’ai pas pu… je me suis réfugié sous/derrière la première camionnette de flic que j’ai trouvé. Pas glorieux. Quoique… J’étais pas là pour ça, et personne ne devrait l’être. Cela dit ça ne m’a pas empêché de chanter fort et fièrement tout le long du match, et d’avoir ma tronche dans le répu ce jour-là ! Gérald avec des cheveux à l’aube de ses 17 ans… R : C’est peut-être la leçon à en tirer… Sinon, deux autres souvenirs sont mémorables. Un déplacement au Parc où on arrive au stade en traitant les fachos, on l’emporte 3-2 (très rare), et l’on met le feu niveau ambiance. Et surtout, la finale de la coupe de ligue contre les lyons. Nous débarquons dans le kop Boulogne (derrière le but et bien séparés du reste des troupes grenat) que l’on graffite avec allégresse. Finale Metz-Lyon CDL96 Finale Metz-Lyon CDL96 Match pourri, mais victoire aux tirs aux buts. Des hools du psg ont visiblement décidé de nous caler une bâche après le match, mais n’ayant pas anticipé qu’en quelques années nous avions enfin autant de gueule que de répondant, ils n’insisteront pas. Tentative de vol de bâche avortée G : Voilà donc ça par exemple c’est un de mes grands regrets, je ne suis pas allé voir cette finale, je l’ai même pas vue à la TV, j’avais un concert le soir-là… En revanche j’ai fait quelques deps quand même à l’époque, mes parents me faisaient confiance. S’ils avaient su ! S’ils avaient su par exemple qu’en rentrant de Lille, en passant par la Belgique, nous avions eu la riche idée de dévaliser une station-service. Enfin je dis « on » encore une fois j’ai fait partie des rares « gentils garçons » bien sagement assis à ma place, lorsque les policiers belges sont venus fouillés le bus. Ma seule préoccupation c’était « comment je vais dire à mes parents que je suis en GAV en Belgique ». Bon je ne sais pas trop ce qui s’est passé, mais finalement malgré toute la bouffe et la boisson qui avait été volée dans la station, on a pu repartir sans trop de retard. Lille – Metz 95/96 Quelques photos de déps, en vrac: R : Nous serons présents en coupe d’Europe, Innsbruck, Newcastle… A St James’ Park, nous croisons Carlo Molinari en lui faisant remarquer qu’il a affrété un avion pour les « loges », sans se soucier du peuple grenat. Il s’engage alors à nous payer le déplacement à Lisbonne (nous n’avions rien demandé, hein). Dans l’édito, il est question de Lisbonne En dépit du respect immense que j’ai pour celui qui restera toujours notre Président, je dois à la vérité d’évoquer le non-respect de son engagement. Notre absence lors de ce match à l’extérieur a constitué un véritable échec (manque de moyens, retard dans l’organisation puisque l’on nous avait promis de la faire pour nous). Le match suivant, nous déployons une banderole vindicative et faisons arrêter le match en balançant des torches sur le terrain, avec deux nouvelles interpellations à la clé (on n’était plus a çà près). Newcastle 96/97 Je ne puis clôturer ce chapitre européen sans évoquer l’épopée de Julien, même si elle a eu lieu juste après la fin du groupe. Il était le seul représentant grenat dans le parcage d’Helsinki, bâchant un message romantique pour sa compagne, et, comme de bien entendu, cramant une torche, ce qui lui valut d’être arrêté et de ne pas voir le match, comme il s’y attendait : la beauté du geste, la grande classe. Chacun de nous se souvient où était son écharpe SG ce jour sombre…. Julien, tu nous manque. Ta torche brûle encore. Nos interlocuteurs (club, RG, sécurité, médias – nous refusions tout contact avec ces derniers et évitions autant que possible les deux premiers -…) ont fini par profondément nous lasser. Incapables de nous contrôler, ils ne savaient comment nous aborder, ce d’autant que nos troupes étaient bien éloignées du supporter traditionnel, et que le noyau dur, constitué principalement de personnes cultivées, et/ou intelligentes, défendaient, quoiqu’il en soit, des valeurs s’enracinant profondément dans le terreau fertile du melting pot culturel et social. Bref, on ne nous la faisait pas. Nous les écoutions avec l’attention d’une nounou surveillant des pré-ados. Je pense sincèrement que ces gens n’avaient pas le niveau pour appréhender la SG, laquelle était inclassable et indifférente à toute sollicitation. Bon, ça c’est fait. Pour le reste, les différents tifos, mais aussi les ambiances vocales, notamment celles contre Bordeaux que tu évoquais plus haut, et le début de celle contre le psg en 1996, assoient un peu plus la domination de ce qui allait devenir la Tribune Est. G : Mais alors, pourquoi avoir dissous la SG en pleine apothéose ? R : Cette dissolution va fonder la légende Graoully aussi sûrement que tout ce que je viens de vous décrire. En un an, les constats suivants s’imposent. Nos « effectifs » ont plus que triplés. La violence attire de plus en plus de membres ou sympathisants. En tribune, les substances illégales rameutent des individus qui n’ont rien à y faire en ce qu’ils sont uniquement présents pour profiter de cet aspect secondaire de notre zone d’autonomie temporaire (ZAT). Notre ZAT est polluée par des poseurs bien éloignés de nos fondamentaux. Elle est devenue le Mont Liban accueillant tout le monde, quitte à risquer de perdre son identité. En parallèle, la seconde génération n’a pas pu (su) former la troisième. Comment leur reprocher ? La première génération a mis 2 ans pour construire le groupe, son développement s’est étalé sur 2 autres années, et son explosion a été fulgurante. Et puis, dans un groupe, ceux qui se défoncent pour la collectivité restent toujours minoritaires. 60 à 80 véritables ultras pour 150 membres et le double de sympathisants, c’est plus qu’il est supportable, car la masse ne connaît pas les codes, et s’en fout royalement. Il faut aussi dire que nombre de membres de la SG ont accompagnés la naissance des raves dans la région et que certains vont s’y plonger corps et âmes à partir de 1995, 1996, avec les tecknivals qui se multiplient (croyant aussi y trouver les remèdes aux maux organisationnels sus évoqués, mais allant en revenir, car ces désagréments sont consubstantiels à toute mouvement collectif, et toute sous culture). ; Une dizaine de Graoully de la seconde génération, va décider de quitter la famille. Le coup a été rude à encaisser pour votre serviteur, lequel menait une quadruple vie : Graoully, chanteur de rock, intérimaire et étudiant. Enfin, la répression déploie ses ailes afin de fonder les bases de la vente du football aux clients des annonceurs publicitaires. Nous n’aurions jamais accepté la fin des fumigènes, le fichage, le contrôle des déplacements, l’injonction de se déclarer en association et autre pitreries dissimulant mal le sacrifice des libertés par le business, guidant la plume du législateur, ce dernier guidant celle de la justice, sur l’hôtel dans lequel se prostituait déjà ce qui n’était plus notre « football ». Cette période est décrite dans un article que j’avais écrit à l’époque dans FREAK GRAOULLY et que je vous invite à lire, de même que celui d’Isham qui y fait écho. J’y pose un ultimatum, Isham y décrit le contexte ambiant. Nous étions trop déjantés pour être raisonnables. Nous étions trop perchés pour faire le ménage dans nos troupes. Nous n’envisagions pas de nous trahir, mais pour ce faire, nous aurions fini en taule. Nous étions trop exigeants pour continuer. « Mourir debout, [plutôt que] vivre à genoux ». Je dis-nous, mais cette décision je l’ai prise et l’ai assumée seul. J’étais trop attachée à ma famille Graoully pour la voir pervertie. Aucune concession. Je voulais la préserver de cette crise de conscience que je sentais inéluctable. Lors de mon annonce, seul Fouad est venu la contester (mais il avait 16 ans à l’époque). G : Tiens au passage, et je ne pense pas qu’il m’en tiendra rigueur, mais Fouad, j’ai un souvenir mythique de lui, lors d’un déplacement, peut-être bien à Auxerre, ou à Strasbourg, peu importe, qui dégueule dans le bus, tout le saucisson qu’il avait ingurgité pendant le trajet. Ca nous avait bien fait rire en plein ramadan ! Pardon excuse-moi, poursuis 😊 R : Haha je vois… bon, comme je te disais, seul Fouad est venu contester ma décision, je pensais donc que beaucoup partageaient mon point de vue. J’ai appris, plus de 20 ans après, que tel n’était pas le cas. En réalité, personne n’avait osé s’y opposer. Pourtant notre tribu du kaos n’avait pas de chef. Or, la SG n’était pas plus mon groupe que celui de mes frères orange, il était notre bien commun (il l’est resté), et si certains m’avait envoyé balader…. Cette acceptation valait donc assentiment à mes yeux, et a renforcé ma conviction. Quoi qu’il en soit, je ne regrette rien, car en implosant en pleine gloire, nous avons créé un trou noir dont allait surgir deux entités totalement différentes et aux parcours divergents, la Faction (en référence à Section) et la Horda Frénétik (en référence à la horde sauvage). Nous avons surtout tracé une ligne intransigeante. Finir en apothéose était naturel. L’orange mécanique va alors donner sa dernière grande représentation à l’extérieur. Le 25 janvier 1997, la SG annonce sa venue, débarque place carnot, affole et torche le centre-ville, cherche vainement les ultras Nancy en se rendant en cortège au stade, prend d’assaut et retourne le bar où ils devaient se trouver, explose picot de ses chants, et soulève une « ola » alors que Metz mène 2-0 (2-3 au final). L’explosion finale, le « total kaos ». En parlant de Nancy, petite parenthèse archéologique avec ces documents retrouvés… : … Ici devait se terminer notre voyage, mais comme vous avez été sage, Gérald et moi vous préparons un épilogue. Je vous rappelle que cette saga est une histoire sans fin. La raconter n’a de sens que pour la transmettre à ceux qui ont repris son héritage. Il sera donc question d’héritage la prochaine fois. Pour l’introduire, je voulais partager ces quelques réflexions. G : D’ailleurs vous remarquerez que Raf propose comme conclusion, une introduction au prochain numéro. Qui conclura cette saga. Il est dingue ce mec… R : S’il te plaît… sois sérieux. C’est très important. Aujourd’hui, l’antagonisme entre les deux tribunes reste fort. Je crois bien que depuis le plan Leproux, Metz reste le seul club à présenter cette configuration. D’aucuns l’expliquent par une opposition entre groupe (extrêmes) de gauche et de droite. En France, l’étiquette est obligatoire. Une telle catégorisation évite de donner les moyens au peuple de réfléchir, car la réflexion l’extrait du carcan qui lui est imposé pour qu’il consomme et soit contrôlé. « Les français sont des veaux » disait le grand Charles…. Relisez « 1984 » d’Orwell, et vous comprendrez où ils veulent en venir (quoi qu’il en soit, lisez ….des livres, hein). Bref, eh bien non. Précisons d’emblée que je suis sorti du mouvement ultra en 1997 et n’y suis jamais revenu, alors souffrez que je vous délivre une analyse personnelle que j’espère la moins partisane possible. La première raison de l’opposition est une histoire de cour d’école : c’est moi qui ai la plus grosse. Eviter cette évidence serait malhonnête. Certains ne tapent que pour cette raison. Mais, il s’agit là de la partie émergée de l’iceberg sur lequel s’affrontent ces deux blocs depuis presque 30 ans. La véritable raison est à rechercher dans les valeurs véhiculée par la Tribune Est. En effet, je ne crois pas une seule seconde que tous les sympathisants du tout nouveau « gradin populaire ouest » partagent les opinions ouvertement nationalistes (fascistes, ou xénophobes, ou en plus moderne, patriotes) de la minorité visible et agissante de celui-ci. Il n’en demeure pas moins que depuis la fondation du mouvement ultra à Metz, il a fallu se positionner face à cette réalité. Sauf à nier cette dernière, il ne peut être évoqué ici une opposition politique puisqu’est en cause un comportement social, autrement dit des règles de vie en communauté. Je réaffirme que lutter contre ces déviances n’est pas l’apanage de gens de gauche (je n’en suis pas, et ne suis d’ailleurs d’aucun parti, je laisse la politique politic(h)ienne dans la poubelle médiatique d’où il serait heureux qu’elle ne sorte pas). Plus grave, exposer que le stade n’est pas le lieu pour régler ces différents, c’est prendre le football pour ce qu’il n’est plus. Tout d’abord, le stade est le seul et dernier lieu de rassemblement du peuple dans la cité. Ensuite, les valeurs du sport sont bien éloignées de celles qui président à cette activité purement économique qu’est devenu le football « moderne ». Enfin, ceux qui s’escriment à faire du stade un sanctuaire de la vie sociale doivent être les mêmes qui, lors d’une agression physique dans la rue ou le bus, n’interviennent pas par indifférence, par peur, et parce que c’est à la police de le faire, laissant donc l’agresseur commettre son forfait par « citoyenneté ». G : Cela me rappelle une anecdote d’ailleurs assez perturbante, une mauvaise expérience que j’ai vécu avec ma copine de l’époque en allant au stade, je t’en parlerai la prochaine fois, puisqu’il y sera question d’amour. Mais d’amour pour le moment, il n’est pas question… R : Non… Il a eu des ratonnades côté autoroute. Je n’oublie pas. J’ai (nous avons) dû me (nous) battre contre ceux qui excluent. Ils ne n’oublient pas. Il y a, et il y a encore, des comportements ouvertement racistes, certes très minoritaires. Tout le monde peut le constater. G : L’occasion de rappeler l’affaire Ouaddou (et pour la peine je te claque un article du Figaro). http://www.lefigaro.fr/sport/2008/03/28/02001-20080328ARTFIG00348-affaire-ouaddou-metz-perd-un-point.php Ecoutez bien ce que dis d’ailleurs la principale victime dans l’affaire à 1.05 : « Faut pas aller jusqu’à arrêter une rencontre parce qu’y a quand même des gens qui ont payé pour assister à un match de football » Roxana, si tu nous lis… R : Face à cela, soit tu la fermes et t’attends de devenir la nouvelle cible de ceux que ton indifférence aura rendus plus forts, soit tu agis. J’accepte que mon prochain soit raciste. Je ne puis accepter que d’autres me privent du droit de combattre ses idées. Je laisse aux bien-pensants le soin de critiquer le choix du mode de réaction, et les laisse réfléchir aussi sur la violence économique, policière, politique, géopolitique, légale… Mais ne rien faire, c’est déjà agir. Alors que ceux qui choisissent de détourner le regard ou de se boucher les oreilles assument aussi leur propre choix. Pour clore cette digression dont le lecteur avide d’anecdotes et de rigorisme voudra bien m’excuser, je précise que les actes de violence sont aussi peu nombreux que montés en épingle. Ne pas le reconnaître alimente le ruisseau d’ignorance dans lequel ou voudrait bien nous jeter. Je suis quoi qu’il en soit fier que cette Tribune Est soit demeurée (dans les deux sens du terme) un lieu insoumis ou l’on chante ensemble ; un lieu de tolérance, d’accueil (notamment des « pd, des crouilles et des toxicos »), de générosité, de résistance, et de joie. Car cette Tribune est bruyante, sulfureuse, adulée et critiquée, mais elle est surtout un symbole de réussite du vivre ensemble, celui qui vous fait progresser, grâce et par l’Autre, vous emporte, vous réchauffe et vous donne envie de partager, et de chanter : « La vie est un sursis, Une courte folie, Oui, mais quoi qu’on en dise, La terre nous est promise ». (Grasshopers – extrait du Troisième œil) A très vite.