284 A l’aube d’une nouvelle saison, Jessica Silva, la coach du FC Metz, s’est livrée à notre micro. Elle évoque entre autres l’exercice 2022-2023 de D2 Féminine, qui s’annonce plus relevé que jamais, ainsi que l’évolution du football féminin au FC Metz et en Europe. Entretien. Jessica Silva, quel est l’état des troupes à l’aube de cette nouvelle saison de D2 Féminine ?Très bon. On a bien récupéré, on est en forme. Hâte de retrouver la compétition, s’entraîner c’est bien mais jouer c’est mieux ! La préparation se passe plutôt bien, on a des joueuses qui s’intègrent au fur et à mesure. Pour le moment, on est plus sur de l’individualisation dans le travail, en fonction de la forme de chacune. On n’est pas encore rentré dans les aspects technico-tactiques. « Notre objectif était d’aller chercher des joueuses d’expérience » Un mot sur le recrutement, faut-il s’attendre à voir encore du mouvement au FC Metz ?Le mercato n’est pas terminé, on est ouvert et à l’écoute. On a officialisé des joueuses qui sont très importantes pour le groupe. Le recrutement a été bien géré. Ottilia Grassetti, qui vient du Brésil, va être un élément différent par rapport aux joueuses de la saison passée. On a hâte de mettre tout cela en place, de tout synchroniser pour jouer l’une avec l’autre. Des cadres sont parties, mais on a le sentiment que vous avez su les remplacer ?Notre objectif était d’aller chercher des joueuses d’expérience, avec du vécu, une maturité dans le jeu et dans le vestiaire. Je pense que l’on s’est plutôt renforcé à ce niveau, c’est un peu ce qui nous a fait défaut la saison précédente. C’est difficile, d’une saison à l’autre, de maintenir le cap quand le groupe bouge énormément comme cela ?C’est la réalité de la D2 Féminine, les contrats vont jusqu’à 2 ans maximum. Les joueuses ne prennent pas le risque de s’engager sur du long terme. Il y a énormément d’offres, le foot féminin continue de grandir. Chaque année, les salaires évoluent, les conditions de travail évoluent. On doit composer avec cette réalité du football. « J’évolue avec mon groupe, c’est ça le cœur de métier ! » Jessica Silva, vous êtes arrivée au FC Metz en janvier 2019, comment votre approche du coaching a-t-elle évolué depuis ?J’ai le sentiment de n’avoir réellement passé qu’un an et demi ici, à cause des saisons arrêtées par le Covid… La saison 2021-2022 était ma première vraie saison sur le banc messin. Chaque année, on tire les leçons pour faire mieux ensuite. Je compte apprendre encore très longtemps ! Il faut parvenir à s’adapter, rester créatif, tout en gardant ses principes et les transmettre. J’évolue avec mon groupe, c’est ça le cœur de métier. Vous êtes riche des cultures canadiennes et portugaises, que puisez-vous de cela ?Le monde est beau, le monde est grand. C’est important de voir des choses ailleurs pour avoir une certaine ouverture d’esprit avec des joueuses internationales, dans la façon de manager, d’entraîner… J’ai appris dans tous les pays où je suis passée. Evidemment, on ne peut pas faire de copier/coller d’un pays à l’autre, mais j’ai pu vivre des expériences qui me confèrent aujourd’hui un joli bagage. Vous êtes désormais bien acclimatée au football français et à l’ADN du FC Metz. Les dirigeants vous ont-ils fixé des objectifs de montée cette saison ?Cette saison est très importante. Il faudra d’abord assurer une place dans les 6 premières pour s’assurer d’être au moins en D2 Féminine la saison prochaine. Avant tout, il faut comprendre que chaque match sera une guerre, contre chaque équipe. Le championnat sera encore plus disputé que l’an passé. Notre club reste ambitieux. Est-ce que la montée est une obligation ? Non, mais nous allons travailler très fort pour. « Le FC Metz est un club riche de valeurs » Jessica Silva, de manière plus générale, le FC Metz est en pleine mutation, notamment au niveau des infrastructures. La section féminine profite-t-elle de ces évolutions ?Le FC Metz est un club riche de valeurs, d’idées, de projets ! Aujourd’hui, la section féminine peut bénéficier de très bonnes conditions de travail, qui nous rendent fières. Cela nous a aidé d’ailleurs pour notre recrutement. On n’est pas les plus riches mais on a de bonnes infrastructures. On aspire toujours à plus mais on est plutôt choyées à Metz. Le FC Metz s’exporte régulièrement auprès d’autres clubs du département à travers des partenariats. Est-ce important de créer une telle synergie autour du foot féminin en Moselle ?A 100% ! C’est une priorité du club et du « FC Metz Moselle ». Nous avons huit clubs partenaires et je peux d’ores et déjà vous dire que nous allons faire huit entraînements délocalisés cette saison. On a toujours été bien reçues. Et en tant que directrice (sportive de la section féminine), je tiens à ce que l’on fasse la promotion du foot féminin. C’est en travaillant avec nos clubs partenaires que l’on mettra en avant le sport féminin ainsi que l’image de notre club. Un peu comme pour l’Equipe de France, c’est notre responsabilité régionale d’être présentes. « Il y a des ligues professionnelles de football féminin en Europe et la France n’en fait pas partie. » Jessica Silva, que pensez-vous de la création de la D3 Féminine ?C’est positif et c’était nécessaire. Les deux pays qui sont en finale de l’Euro, l’Angleterre et l’Allemagne, ont tous les deux une première division professionnelle avec de gros investissements de la part des clubs. Et on voit la différence sur le terrain, ces deux pays sont récompensés pour leurs investissements dans le foot féminin. La France va devoir s’accrocher, « il va falloir penser à professionnaliser le football féminin en France », pour reprendre les mots de Sonia Bompastor. On va vite se retrouver derrière si on ne fait pas gaffe. Où situez-vous la France par rapport au gratin européen du foot féminin ?L’Espagne est en train de s’accrocher. L’Italie est en train de se professionnaliser. Des pays investissent de plus en plus. Ce n’est pas à moi d’évaluer où se situe la France mais ce que je sais, c’est qu’il y a des ligues professionnelles de football féminin en Europe et la France n’en fait pas partie. Un dernier mot sur les U18 qui sont montées à l’étage supérieur la saison passée ?C’est une grande fierté ! C’était très émouvant parce que c’était l’objectif de la saison passée. La tâche ne sera pas facile cette année. Le groupe des filles sera assez costaud, avec tous les clubs de D1. L’équipe est assez jeune, certaines filles s’entraînent avec le groupe de D2 et seront importantes à l’avenir. Et cette année sera une année d’apprentissage, de grands défis, pour le club, les joueuses et le staff. Mais comme d’habitude, on portera le maillot avec fierté. Propos recueillis par Gérald Russello & Arthur CarmierCrédit photo : Julien Buret/LGM