173 Dimanche le FC Metz reçoit son éternel rival du Grand Est, le Racing Club de Strasbourg Alsace, dans un derby qui n’en a malheureusement plus que le nom. Metz, 26 août 1995…Sous le soleil grenat de la Section Graoully et poussés par les « presque » 20 000 spectateurs de Saint Symphorien, les joueurs de Joël Muller vont réserver un accueil pour le moins chaleureux aux rivaux Strasbourgeois. Metz-Stras 95/96 sous les applaudissements de tout le stade, le soleil grenat de la SG éclipsa l’Alsace A l’époque au Racing, on a du Marc Keller, du Franck Leboeuf, du Franck Sauzée. Excusez du peu… L’ambiance aux abords du stade est électrique, dans les travées ça sent la bière et l’oignon frit, dans les tribunes on s’époumone au rythme des tambours, on s’ambiance au son des cornes de brume. Les artilleurs grenats s’appellent Isaias, Cyril Pouget, Robert Pires. Chacun son chant, chacun son hymne, Saint-Symphorien est bouillant, la France du football retient son souffle, le coup d’envoi d’un des matchs les plus sulfureux du championnat de France de 1ère division est donné. Le reste fait partie de l’histoire… Des derbys comme celui-ci, il y en a eu beaucoup depuis les années 30 et à Metz on aime se remémorer les chiffres. Car si le palmarès des alsaciens peut sembler très légèrement supérieur à celui des Lorrains, le bilan des confrontations ne souffre lui d’aucune contestation, et cela sera toujours le cas dimanche après le coup de sifflet final, quel que soit le résultat du match. 118 derbys, 51 victoires Messines, 37 matchs nuls et seulement 32 victoires Strasbourgeoises. Aucun doute n’est permis, comme le dit l’adage, à l’instar de la Lorraine, le Grand Est est Grenat et il le restera encore longtemps.Seulement pouvons-nous encore réellement parler de derby de nos jours ? Rien n’est moins sûr. Outre les stades vides depuis maintenant trop longtemps à cause de la crise sanitaire, ces matchs censés nous émoustiller n’ont plus la même saveur depuis que les arrêtés préfectoraux interdisent aux supporters des deux camps de se déplacer en groupe. Bien sûr, il reste toujours les courageux qui, privés de parcage visiteurs, s’invitent dans les tribunes adverses, bien dissimulés au milieu de l’ennemi et qui tentent difficilement de cacher leurs émotions sur chaque action. Mais cette pratique est marginale et peut même de nos jours vous valoir une amende, voire une évacuation du stade si par malheur vous osez porter les couleurs de votre équipe de cœur. Que vous soyez ultra, retraité, étudiant, cadre ou prolétaire, le supporterisme est désormais prohibé, afficher ses couleurs est un crime qui peut vous valoir une interdiction de stade. Florent Mollet célébrant son but face à Strasbourg en décembre 2017 Belle époque.On est loin de l’esprit derby des années 80/90/00. Très loin même… D’ailleurs sur le terrain c’est pareil, les vingt-deux acteurs n’ont généralement plus conscience du combat qu’ils doivent livrer, car s’il n’est pas rare d’avoir des échanges symboliques de joueurs entre les deux clubs (Oukidja, Diallo pour ne citer qu’eux), peu de pensionnaires des centres de formation ont la chance de vivre ces derbys dans l’élite. Dimanche sur la feuille de match, nous ne devrions retrouver que Matthieu Udol et Youssef Maziz, seuls représentants de la plaine ayant connu la ferveur de ces matchs dans les équipes de jeunes.Et pourtant le folklore tente de perdurer à travers les ultras qui maintiennent la flamme, notamment ce weekend avant le match avec un cortège d’accueil de l’ensemble des groupes aux abords du stade. Belle initiative et bel effort malgré la situation. Seulement une fois le bus rentré dans l’enceinte du stade, il faudra vite que tout ce petit monde rejoigne son domicile pour pouvoir vivre l’évènement à la télévision. Finies les odeurs de bière et d’oignon frit dans les travées, fini le bruit des tambours et des cornes de brume. Dans le froid d’un hiver sans fin, le silence l’emportera sur la liesse.Vous avez dit derby ? Crédits photo : DR