Habib Maïga : « Je suis amoureux du FC Metz ! »

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En pleine période de déconfinement, nous avons eu l’occasion de nous entretenir par téléphone avec Habib Maïga. Le milieu de terrain âgé de 24 ans évoque avec nous son quotidien, sa vie de père de famille, en passant par sa saison avec le FC Metz, puis son rapport avec la sélection nationale. En toute décontraction et bonne humeur, l’international ivoirien nous confie également son amour pour le club…

Quelle a été votre réaction par rapport à l’arrêt définitif du championnat ?

Je n’étais ni contre, ni pour. C’est un problème sanitaire, il y a beaucoup de personnes qui sont décédées et d’autres qui sont encore malades donc je pense que la décision du gouvernement est juste même si on aurait voulu terminer le championnat parce que nous on ne vit que pour le football. C’est toujours bien de jouer, de s’entraîner, mais je pense que c’est une décision sage.

Un programme individuel ne remplace pas les entraînements quotidiens en équipe, comment faites-vous pour rester en forme ?

Non, ça ne remplace pas effectivement. Les coachs nous ont fait une proposition d’entraînement individuel mais ce n’était pas obligatoire. On essaie de s’entretenir à la maison au maximum même si les entraînements individuels ne remplacent pas les entraînements collectifs, mais le plus important c’est de garder la forme un minimum.

Vous taquinez un peu le ballon à la maison ?

Oui, on a des travaux d’appuis avec ballon. C’est vraiment pas mal comme programme et ça va beaucoup nous aider pour la reprise ! Parce que là, ne rien faire pendant des mois, c’est vraiment compliqué, donc le fait de nous entraîner individuellement c’est d’abord pour nous-même, donc on essaie de suivre au maximum les entraînements que le club nous a proposés même si ce n’est pas obligatoire.

Cette période a dû vous laisser beaucoup de temps libre. En dehors du football, quels sont les centres d’intérêts d’Habib Maïga ?

Ma famille ! Je suis papa depuis 4 mois donc j’essaie d’apprendre le métier de papa parce que c’est un métier, c’est dur ! (Rires)
Donc je me suis consacré à mon fils et ma femme. On est restés à Metz, on a respecté au maximum le confinement. Tout s’est bien passé, j’essaie de m’occuper en aidant un peu ma femme à faire les tâches de la maison. (Rires)

Et aujourd’hui, comment se passe votre déconfinement ?

Progressivement, pour moi ça n’a pas encore changé car je suis toujours à la maison. Quand je sors, c’est pour faire les courses, comme pendant le confinement. On attend que les choses soient bien stables pour envisager de peut-être partir en vacances et changer un peu d’air.

Frédéric Antonetti, « du lourd » dans le domaine du coaching pour Habib Maïga. (Crédit photo : DR)

Revenons maintenant sur votre carrière. Vous avez été sous les consignes de plusieurs entraîneurs pendant votre carrière, est-ce qu’il y en a un en particulier qui vous a marqué ?

Je n’ai pas passé beaucoup de temps avec le coach Antonetti mais le peu de temps que j’ai passé avec lui c’était quand même « du lourd », j’ai beaucoup appris, que ce soit sur le terrain ou en dehors. Il y a un autre entraîneur qui m’a marqué, c’est Ibrahim Kamara, l’ancien sélectionneur de la Côte d’Ivoire. Je l’ai eu depuis mes 16 ans, jusqu’en Equipe A, il m’a donc beaucoup marqué également.

Et parmi les joueurs avec qui vous avez partagé le terrain, est-ce qu’il y en a un qui vous a particulièrement marqué ?

Franchement, il y en a beaucoup ! (Rires) Je peux en citer plusieurs : en sélection il y a Nicolas Pépé et Wilfried Zaha. En club il y a eu Rémy Cabella, à Saint-Etienne c’était du lourd. Ici à Metz, il y a Noss Traoré et Farid Boulaya.

Farid Boulaya, un des joueurs qui a le plus marqué Habib Maïga.

J’ai l’impression que ce sont des joueurs techniques qui vous ont marqué ?

Non pas forcément mais ils sont impressionnants. Maintenant, si je dois donner mon modèle, mon exemple, la personne qui m’inspire tous les jours, c’est mon ami Franck Kessié, il joue au Milan AC. C’est lui qui me motive à me lever les matins et à me dire que tout est possible dans la vie. J’ai travaillé avec lui et c’est vraiment un bosseur, un travailleur fou, c’est un exemple pour moi.

En 2018 vous avez été prêté 6 mois par Saint-Etienne à l’Arsenal Toula en Russie où vous n’avez participé à aucune rencontre, est-ce que vous pouvez nous en dire plus sur cette mésaventure ?

En réalité j’ai disputé un match. J’ai fait 35 minutes et je me suis blessé, saison terminée… J’étais parti à l’Arsenal Toula avec beaucoup d’envie et de détermination, j’avais vraiment envie de réussir quelque chose parce que c’était un gros pari pour moi de quitter la France pour aller en Russie en prêt. J’ai voulu essayer pour voir ce que ça allait donner, malheureusement les choses ne se sont pas passées comme prévues car je me suis blessé sur ce premier match. J’ai traîné cette blessure pendant environ 8 mois donc ça reste quand même un mauvais souvenir car je n’ai pas beaucoup joué, même si je garde également de beaux souvenirs de la Russie.

C’était quand même une bonne aventure humainement ?

Bien sûr ! J’ai beaucoup appris et ça m’a forgé mentalement.

Après la Russie, il y a le retour à Saint-Etienne et puis l’arrivée au FC Metz avec lequel vous êtes désormais lié jusqu’en 2023. Est-ce que votre objectif c’est de vous installer durablement ici et de devenir un cadre éventuellement ?

Je me sens super bien à Metz, j’ai tout de suite aimé la ville. Je suis prêt à respecter les années de contrat qu’il me reste. Dans ma tête je suis à Metz, je ne me suis pas projeté sur un éventuel départ, je me prépare pour la saison prochaine et heureusement on a assuré le maintien même si cela a été dur au début. Franchement c’est une ville que je kiffe, le club et les supporters sont magnifiques, ils m’ont tout de suite adopté donc la meilleure façon de leur rendre la pareille c’est de continuer. Je n’ai pas envie de me disperser, j’ai envie de rester à Metz pour continuer ma progression.

Crédit photo : (DR)

Vous parlez justement des supporters. On se souvient tous de votre célébration après ce but face à l’ASNL dans un derby, c’est important pour vous de garder ce contact entre les joueurs et le public ?

Sans le public, le footballeur n’est rien ! C’est déjà bien ce qu’ils font, c’est quelque chose de grand. Ils sont présents à tous les matchs, qu’il fasse 2 ou 30 degrés ils sont là, donc la moindre des choses c’est de leur renvoyer l’ascenseur !
Contre Nancy, ce n’était pas prévu, j’ai marqué, ça m’a surpris… Je n’avais pas de célébration dans la tête donc j’ai sauté dans la tribune et si cela a plu aux supporters tant mieux car moi ça m’a plu de passer ce moment avec eux !

Ça devient de plus en plus rare de voir des joueurs comme vous qui ont cette « mentalité club ». Pour vous qu’est-ce qui a changé dans le football moderne ?

Pour moi, peu de choses ont changé. Après chacun sa mentalité mais moi j’ai un état d’esprit de gagneur, même aux entraînements je ne lâche rien, j’ai toujours envie de gagner, tout en respectant les règles. Tu ne peux pas gagner et être satisfait tous les jours mais moi dans ma tête c’est « gagner, gagner, gagner » en respectant beaucoup de choses.
Je pense qu’il n’y a pas beaucoup de choses qui ont changé dans le football d’aujourd’hui, si ce n’est peut-être certains états d’esprit, mais ce n’est pas mon cas. Si un club et une ville te font confiance, le meilleur moyen de leur retourner cette faveur c’est de mouiller le maillot. Tous les week-ends je suis dans cet état d’esprit là, même s’il y a des matchs où je peux ne pas être bon, on ne pourra jamais me reprocher mon investissement. J’essaie de montrer le maximum pour rendre une bonne copie, cela commence par les entraînements.

« J’essaie de montrer le maximum pour rendre une bonne copie, cela commence par les entraînements. »

Parlons de cette saison Habib. Avec 35 points en 28 journées, vous terminez à une honorable 15e place, est-ce que vous estimez que la saison du FC Metz est réussie malgré quelques flottements en début de saison ?

C’est une saison réussie car en début de championnat, je pense qu’on manquait un peu d’expérience. Sur 2 ou 3 matchs on s’est fait remonter bêtement au score, il y a eu des buts que l’on pouvait éviter. C’était des erreurs de jeunesse je pense, en seconde partie de saison on a vu une équipe solide, qui ne prenait pas beaucoup de buts, déterminée et solidaire sur le terrain donc pour moi c’est une bonne saison. Même si le championnat avait été arrêté en milieu de saison , on aurait accroché le maintien malgré le fait qu’on était pas bons. Si on avait été plus solide en début de saison, je pense qu’il y avait la possibilité qu’on soit mieux classés, peut-être dans les 10 premiers.

Le top 10, un objectif possible pour la saison prochaine ?

Oui, il faut rêver grand, tout est possible, il faut y croire et travailler pour. Si on met toutes les chances de notre côté il n’ y a pas de raison car on a un effectif de qualité, avec des joueurs d’expérience mais aussi de la jeunesse donc si on rame tous dans le même sens, je pense qu’on peut y arriver. Il faut qu’on soit tous sur la même longueur d’onde. On a un bon groupe, on vit bien.

La plupart des observateurs vous désignent comme le moteur du FC Metz au milieu de terrain, est-ce que vous avez le sentiment d’avoir franchi un cap cette saison ?

Oui, en faisant mon auto-critique et je pense avoir franchi un cap. Après un match, j’ai tendance à ressasser et je sais si j’ai été bon ou pas. Ce que je dois améliorer, je le sais tout de suite. Je pense que cette saison j’ai franchi un cap mais que j’ai encore beaucoup à apprendre, je sais que je peux faire encore plus donc il faut que je continue à bien travailler pour être bien sur le terrain. Je vais me mettre dans cet état d’esprit de vouloir toujours apprendre pour être le plus performant possible. Je pense que j’ai fait une bonne saison même si je dois encore améliorer certains points pour être bien. J’ai envie d’atteindre la perfection, c’est ce que je vise, et je vais travailler pour.

Crédit photo : Matthieu Henkinet

Vous avez fait deux saisons pleines avec le FC Metz, vous êtes enfin débarrassé de vos pépins physiques ?

Je suis amoureux du FC Metz ! (Rires) Cela fait deux saisons que je joue ici et je n’ai eu aucune blessure, je ne peux qu’être amoureux de ce club, il me porte chance. Dans le passé ce n’était pas le cas, j’ai eu beaucoup de pépins physiques. Il faut aussi féliciter le staff, les dirigeants qui m’ont bien suivi pour que j’évite les blessures, pour l’instant ça paie et j’en suis content. Ces deux saisons sans blessure sont une victoire. Maintenant je connais mieux mon corps, avant ce n’était pas le cas. Quand je sens qu’un truc ne va pas je le signale tout de suite et ça évite beaucoup de choses, tout ça c’est de l’expérience aussi.

Les statistiques de cette saison en Ligue 1 montrent que vous êtes l’un des meilleurs milieux en terme de récupération. Selon vous, cette étiquette de « muraille » influe sur le mental de l’adversaire avant un duel ?

Peut-être, mais en tout cas ça n’influe pas sur moi. Je respecte toujours les adversaires, une fois sur le terrain c’est comme la guerre maintenant, ça ne se fait plus avec les armes à feu mais sur le terrain. Une fois sur le terrain, je donne le maximum pour être le meilleur. Il y a des personnes qui ont la même mentalité de ne rien lâcher, d’autres pas du tout. Après milieu récupérateur c’est bien, je suis dans mon registre mais je peux encore faire plus, je le sais.

Est-ce que ce domaine, qui est votre point fort, vous le travaillez spécifiquement ou bien vous vous concentrez sur d’autres points de votre jeu que vous voulez améliorez ?

Non ça se travaille aussi, ce n’est pas un acquis. Ce n’est pas parce que c’est une de tes qualités que tu dois t’endormir et de ne pas travailler ce côté là. Je travaille pour garder cela mais aussi ajouter des choses qu’il me manque, que je dois améliorer et ça c’est tous les jours. Au quotidien j’essaie de travailler cela, mais aussi travailler hors de ma zone de confort et ajouter ces manquements.

Habib Maïga sous le maillot des Éléphants (Crédit photo : sport-ivoire.ci)

Évoquons la sélection. En théorie, la CAN devrait se dérouler en janvier 2021, je suppose que c’est un objectif pour vous que d’y participer avec la Côte d’Ivoire ?

Bien sûr, c’est un rêve ! A cœur vaillant, rien d’impossible. Je suis déterminé à vouloir participer à cette CAN, je vais mettre toutes les chances de mon côté en restant le plus constant dans mes matchs. J’ai régulièrement le sélectionneur au téléphone, donc on attend la reprise mais pour moi c’est un rêve. J’ai fait toutes les catégories avec la sélection et aujourd’hui je me retrouve en Equipe A. C’est une fierté mais pas une fin en soi, j’ai bien envie de faire quelque chose de grand comme remporter une CAN ou participer à une Coupe du Monde, ça doit être quelque chose de magnifique donc je vais mettre toutes les chances de mon côté.

J’imagine que vous avez envie de succéder à Alexandre Oukidja qui a remporté la dernière CAN avec l’Algérie

Ah oui ! J’étais très content pour Alex ! J’ai bien envie de remporter cette CAN aussi pour le peuple ivoirien, même si on en a déjà gagné deux par le passé. J’ai été champion d’Afrique en 2013 avec les U17 Ivoiriens, j’ai bien envie de remettre ça avec les A…

Crédit photo : Kévin Bignossi

Plusieurs personnalités du football Africain, comme notamment Samuel Eto’o, sont pour un report de la CAN, quel est votre avis ?

Je n’ai pas trop de nouvelles concernant les éliminatoires car il reste encore quatre matchs pour se qualifier, la CAN est dans 7 mois. C’est un peu juste mais après c’est à eux de s’organiser, nous on est comme des soldats. S’ils annulent, ok. S’ils donnent le top départ, on suivra. Je suis prêt dans les deux cas.

Vous ne craignez pas que tout le flou autour de la tenue de la compétition interfère avec votre saison en club ?

Je ne pense pas, moi dans ma tête je suis déjà prêt pour une CAN en janvier, si on est qualifiés je l’espère. La saison 2020-2021 est déjà calée dans ma tête, après il faut travailler pour ça, il faut bien s’entraîner car il y a l’entraînement visible et invisible. L’entrainement invisible c’est ton mode de vie à la maison (bien dormir, bien manger, bien se reposer…) si tu suis ça bien, il n’y a pas de raisons que ça ne se passe pas bien entre le championnat et la CAN.

De toute manière Habib, vous avez 3 poumons donc vous allez pouvoir tenir tout ça !

Non, non, non, je me fatigue aussi ! (Rires)
Comme je l’ai dit, il faut bien dormir, bien manger et bien se reposer. Notre corps c’est notre outil de travail, il faut bien l’entretenir, c’est comme une voiture. Donc tant que tu respectes ça, ton corps répondra présent !

Crédit image à la une : Matthieu Henkinet
Retranscription : Julien Buret et Arthur Carmier

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