Metz Handball. Emmanuel Mayonnade : « On aurait pu perdre le titre »

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Au sortir de la troisième journée de Ligue Butagaz Energie, Emmanuel Mayonnade est venu évoquer le visage actuel de Metz Handball qui conserve son invincibilité avant la réception du FTC Budapest.

Metz Handball reste invaincu après sept matchs disputés (6V,1N) mais l’équipe d’Emmanuel Mayonnade vit un début de saison assez poussif. Cette nouvelle victoire étriquée face à Plan-de-Cuques n’a pas dérogé pas à la règle d’un champion de France qui manque toujours de constance dans le jeu qu’Emmanuel Mayonnade veut mettre en place.

« Depuis le début de l’année, on ne se donne pas encore les moyens pour se rassurer »

La deuxième mi-temps n’était pas simple aujourd’hui. Elles ont su faire trembler quand il le fallait.
Emmanuel Mayonnade : Oui, c’est sûr. Ça n’a pas été simple, et même un peu plus que ça encore. Je l’ai dit aux filles à l’issue du match, il y a des moments clés qu’on ne maîtrise pas du tout. On est à 12-8 à la 24e, on a un ballon de +5. On le rate, en se précipitant ,en le prenant vite, alors qu’à ce moment-là, la dynamique doit nous inciter à nous dire : « OK, on va le garder, on va stabiliser quelque chose de plus consistant« . Sauf que de ce 12-8 à la 24e, on bascule à +2 alors qu’on a eu un ballon de +5 quelques temps avant. Puis le Metz Handball du moment, c’est celui qui, effectivement, tremble un peu, ne joue pas libéré, a peut-être du mal à se rassurer aussi… Mais en même temps, depuis le début de l’année, on ne se donne pas encore les moyens pour se rassurer. Il n’y a pas un match où on a déroulé assez facilement pour se dire « OK, je peux tenter des choses« . Donc ce que j’ai dit : On aurait pu perdre le titre de Champion de France ce soir. Peut-être qu’on l’a gagné. Ça, on le saura plus tard. Il va falloir attendre encore et encore, alors que dans le premier cas de figure, on aurait su de suite.

 « On ne s’est jamais rendus la vie facile »

Comment expliquer ces matchs à répétition qui se jouent sur la fin ? Il y a eu les Jeux Olympiques, beaucoup de changements en intersaison mais la mayonnaise tarde à prendre même si les résultats sont là.
Alors, on construit quand même sur des victoires. Et parfois, je me dis que le jour où ça jouera mieux, on ne se rappellera peut-être pas de ce qu’il s’est passé. Mais pour l’heure, effectivement, les questions sont multiples. Les Jeux Olympiques, ça va un temps, on ne pourra pas se cacher éternellement. On voit qu’il y a des équipes, Brest par exemple, qui arrivent à surfer assez facilement sur ce qu’il se passe. Par contre, nos collègues en Europe ne sont pas plus flamboyants, à part FTC. Győr fait un match nul contre Buducnost là, CSM est en difficulté, etc.

Mais pour parler de nous, je pense qu’on ne s’est jamais rendus la vie facile. Par le passé, certaines ont eu la bonne idée de se construire à Metz avec des scores fleuves et une prise de conscience que les choses pouvaient être un peu faciles parfois. Je me rappelle, je le dis souvent, mais le premier match de Ligue des champions pour Djazz [Chambertin], c’est un +15 face au FTC. Tu lances vite une carrière à Metz ou un état d’esprit assez favorable. Là, je sens bien qu’il y a plus de crispations. Il y a des joueuses qui sous-jouent un tout petit peu parce qu’on joue avec le frein à main. Aujourd’hui, il n’y a rien de facile pour ce Metz Handball. C’est tout le temps dur alors que le potentiel est réel. Quand je vois une Petra en deuxième mi-temps, par exemple, je me dis que c’est quand même très, très fort. Aujourd’hui, les maux mots sont un peu différents. Parfois c’est défensivement, parfois offensivement. C’est un peu les deux. Il y a un manque de constance et de capacité à tuer le match quand il faut le faire.

Vous évoquiez Djazz. En deuxième mi-temps, sur la fin notamment, elle réussit des choses qu’on ne voyait peut-être pas l’année dernière où elle était parfois en difficulté en attaque. Elle a peut-être eu un déclic. Ça fait partie des joueuses comme ça qui, en deuxième année, parviennent à aller un petit peu plus loin.
Oui, c’est possible. Djazz s’entraîne incroyablement bien. L’énorme atout de Djazz est sa capacité à défendre bien, fort, être disciplinée dans le projet. Dans la continuité, elle attaque et elle le fait plutôt bien. C’est vrai que sa deuxième mi-temps est assez intéressante. Donc, il y a quand même matière à faire quelque chose. Mais quand on parle de Djazz, je suis obligé de faire un parallèle avec Tyra [Axnér]. Tyra a des qualités, c’est sûr. Mais aujourd’hui, la lancer dans une situation comme celle-ci, je me dis que c’est presque suicidaire. Ce n’est peut-être pas un bon moyen de l’accompagner alors qu’elle a clairement toutes les ressources.

« Je prends les décisions comme je les ressens »

Emmanuel Mayonnade durant le match de pré-saison face à Krim Ljubljana, le 31 août dernier

Est-ce facile de faire les feuilles de match ? Aujourd’hui, trois joueuses ont été laissées au repos et Cléopâtre Darleux a été lancée. Et comment allez-vous décider sur les prochains matchs ?
D’abord, c’est très facile pour moi. Je prends les décisions comme je les ressens. Je suis droit dans mes bottes par rapport à tout ça. Les explications sont à chaque fois multiples. Et je l’ai dit aux filles, je ne me justifierai pas parce que si je commence à le faire, je vais m’enfermer, me piéger dans un truc que je regretterai d’ici un mois ou deux. Donc je prends mes décisions. Soit c’est de l’engagement en séance, soit c’est le rapport de force, soit c’est la concentration de la semaine, soit ce sont les petits bobos. C’est un peu tout ça. Là, il a fallu trancher sur une gardienne. Il était inimaginable qu’on ne lance pas Cléopâtre ce soir, qui fait une excellente première mi-temps. Mais pourquoi Camille [Depuiset] plutôt que Zsófi [Szemerey] ? Camille m’a semblé plus stable à ce moment-là que Zsófi.

Il y a des choix qui sont aussi les nôtres. Donc on en est là aujourd’hui. Mais moi, je l’assume très très bien. Je préfère être à cette place-là que celle de Plan-de-Cuques, par exemple, qui a du mal à faire une compo. Après, c’est ce que je dis, je fais un choix. Celle qui l’accepte, relance. Par exemple, j’ai Anne Mette [Hansen] en tête-là, qui a été extraordinaire, qui a dit « ok pas de soucis« . Cependant, on ne parle pas à Anne Mette comme on parle à Zaliata [Mlamali]. Avec Anne Mette, c’est un process. On va lui dire : « On ne va pas te refaire jouer là, te ré-impacter. Tu vas travailler en musculation avec Samuel pendant un jour ou deux. Et puis, il y a un bon match qui t’attend en fin de semaine« . On est aussi un peu là.

En Ligue des Champions, c’est peut-être un peu moins de casse-tête. Il y a plus de joueuses sur la feuille de match.
Bien sûr, bien sûr. Après, il faudra sûrement trancher et enlever quand même quelqu’un en Ligue des Champions. Mais c’est pareil, je le ferai très sereinement. Ce n’est pas quelque chose qui m’inquiète. Je l’ai dit. Tu l’acceptes, tant mieux, tu accompagnes l’équipe. Tu ne l’acceptes pas, tant pis. C’est toi que tu frustres et l’équipe aussi.


Emmanuel Mayonnade, vous avez gardé quelques joueuses un peu plus longtemps au vestiaire après le match. Il y avait un message particulier à passer ?
Non, ce n’est pas ce que j’avais envie. J’avais envie qu’on arrive à construire ensemble la stratégie défensive du match du week-end. Je voulais qu’elle soit co-construite. On a un peu de temps parce qu’on a joué mardi. Donc, c’était aussi ça. Si j’avais joué le match mercredi, il aurait fallu vite enchaîner. Donc, j’ai passé des papiers, des vidéos à tout le monde pour dire : « Regardez ça. Ça vous fera 20 minutes à regarder, 20 minutes à écrire. Et puis, on parle de tout ça et de la stratégie sur les temps à venir« . Donc, c’était juste une volonté de co-construire l’organisation défensive du match à venir. Et c’était les postes 3 essentiellement. Anne Mette, Sarah, Anne-Emmanuelle, Djazz et Allison…

Propos recueillis par Matthieu Henkinet

Crédit photo : Matthieu Henkinet/Let’s Go Metz

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